Baulmes provient de l'appellatif de Balmensis, Balma, baume, qui désigne un abri sous roche, une caverne. Le " l " figurant au milieu du nom ne se prononce pas et on ignore son origine, bien que de nombreux documents historiques datant d'avant l'époque bernoise et qui émaillent les riches archives communales, ne l'incluent pas dans leur orthographe. Baulmes est un lieu habité dès la haute antiquité qu'on suppose être parmi les premiers du Canton. Les fouilles archéologiques entreprises sous la direction du professeur Michel Egloff au lieu dit Misterdame derrière la cure actuelle remontent 13 mille ans des civilisations qui vécurent là. Ce site préhistorique a révélé, entre autres, des outils en pierre taillée, des os de rennes, etc.
Un prieuré existait dès le IVe siècle. Une église construite en bois est citée en 627, mais est disparue dans un incendie. Les restes d'une chapelle, encore visibles sur l'arête de Misterdame à environ 1000 mètres d'altitude, rappellent son culte voué à Saint-Michel. Au XIVe siècle, l'industrie du tissage des toiles de lin, dont la réputation s'étendait très loin, fut très prospère pour le village. Les drapiers marquaient leurs étoffes d'une aile de Saint-Michel et d'une crosse. Cette activité tomba en désuétude à cause de l'imitation des empreintes Baulmérannes accaparées par d'autres artisans dont les ateliers étaient très éloignés de la région. Selon la tradition orale, Baulmes aurait été entièrement détruite par un incendie au début du XIVe siècle. Tout porte à croire à l'authenticité de ce sinistre. En effet, les archives communales ne remontent qu'à cette époque et jusqu'au début du siècle dernier, on ne pouvait fouir la terre nulle part dans le village sans trouver des objets calcinés.
La conquête du Pays de Vaud par les Bernois ne provoqua pas de grand bouleversement dans la vie du village. Le 3 janvier 1537, le culte protestant fut imposé non sans une certaine réticence des villageois, très attachés à leur foi catholique. Pourtant, l'adoption de la réforme finit par entrer dans les mœurs des Baulmérans. Preuve en est cette pièce dramatique, jouée à Baulmes et dans toute la région le 2 juin 1549 pour la première fois, devant un nombreux public enthousiaste. Intitulée " La chrétienté qui estoit malade " son thème était dirigé contre l'église romaine. D'une durée de 6 heures, la jeunesse du village y déploya une grande magnificence.
Quatre ans plus tard, une femme, bourgeoise de Baulmes, Marguerite Perusset, accusée d'être "vaudaire" soit en relation avec les puissances occultes, fut brûlée vive sur la place du château, à Yverdon, condamnée par LL.EE de Berne.
Le pouvoir Bernois fut profitable aux habitants du village qui glanèrent de nombreux droits. La Commune et ses biens étaient régis par le Général de Commune (législatif) et le Noble Conseil (exécutif).
Chaque paroisse élisait un Consistoire, tribunal mi-laïque, mi-ecclésiastique, chargé du maintien des bonnes mœurs, du respect de la religion, de dénoncer au Bailli Yverdon les ivrognes, cabaretiers débaucheurs et femmes de mauvaise vie. L'exécution des lois et ordonnances, légiféraient parfois jusque dans le moindre détail, assignant les places au temple aux personnalités locales, qui devaient s'annoncer préalablement en cas d'absence et être au bénéfice d'une excuse valable.
On découvre encore sur les rives de la Jougnenaz, petite rivière qui se jette dans l'Orbe en empruntant, pour un moment, le territoire français voisin, les vestiges d'un haut fourneau. Implanté en bordure d'un cours d'eau avec, à proximité, une abondante forêt servant à son alimentation en charbon de bois, il valorisait le minerai de modestes mines situées près de L'Auberson. Transformé en fer et de la Jougnenaz acheminé jusqu'à Vallorbe à dos d'ânes, il servait à la fabrication d'armes et d'outils divers.
Un citoyen du village ayant eu vent de la rareté précieuse du venin de vipère en imagina l'élevage et instaura une vipérie dans la seconde moitié du XIXe siècle, fournissant en venin les laboratoires scientifiques de Baden, de Bâle et d'ailleurs.
En 1814, des soldats Autrichiens furent stationnés à Baulmes et dans la région. Antoinette Deriaz ayant surpris un des ces soldats marauder des fruits dans son verger, l'invita avec véhémence à rendre les poires volées. Le soldat - se moquait-il de son interlocutrice ? Ou ne pratiquait-il pas le patois Baulméran ? - continuait en tout cas de cueillir les fruits défendus, provoquant en cela l'ire de l'Antoinette qui lui lança sa bêche, le blessant grièvement. Le commandant de la troupe prenant cet acte pour de l'hostilité, menaça d'incendier le village en représailles. La population était terrorisée. Heureusement, un citoyen du lieu pratiquant l'allemand réussit à faire croire aux soldats la femme folle et leur assurer son enfermement jusqu'à la fin du séjour des troupes, réussissant ainsi à apaiser le conflit.
Les forêts, très giboyeuses à cette époque, comptaient plusieurs hardes de loups et de nombreux ours. Des chasses contre ces prédateurs étaient organisées régulièrement. Les chasseurs, convoqués au son de la cloche, étaient rémunérés de 3 florins par la bourse communale, à chaque battue. Le dernier ours de la région fut abattu le 30 novembre 1827 dans les rochers de la "cave à Barbarreau" au-dessus du village après "un combat acharné".
Dès la fin du 19ème siècle, la commune connut un développement considérable, bénéficiant des premières retombées de l'ère industrielle naissante, avec la construction en 1895 de l'usine des chaux et ciments qui cessa son activité en 1960 et la ligne de chemin de fer Yverdon-Sainte-Croix, installée à la même époque et qui utilise sur près de la moitié de son parcours, le territoire de la Commune de Baulmes.
Fière de son illustre passé pétri d'histoire, la commune d'aujourd'hui saura encore vous ravir par ses contrastes, en égrenant de la frontière que nous partageons avec la France ses volutes boisées, la roche grise et sévère des "Aiguilles", sommet culminant à 1559 mètres d'altitude, où la douceur ondoyante des champs cultivés, déroulés comme des morceaux d'étoffe. Jusqu'au vignoble du Bochet, à l'extrême sud du territoire, choyé par un viticulteur-encaveur et berceau d'une vigne collective, qu'une centaine de passionnés cultivent, en même temps que leur amitié et bonne humeur, pour leur plaisir et l'attachement qu'ils vouent à ce coin de Pays.